Le seigneur des anneaux
Après les cas pratiques, un peu de théorique! (Le genre de post long à écrire, avec très faible retour sur investissement…)
Un article de l’équipe de Milan et de Chicago (pas les Bulls, l’équipe CARDIO de Chicago et Roberto Lang, le pape de l’ETO 3D, le seigneur des anneaux), paru dans le JASE N°5, il y a quelques semaines.
Le but est d’étudier le couple aorto-mitral en ETO 3D avant et après chirurgie programmée de plastie mitrale sur 28 patients.
A l’heure actuelle, les logiciels disponibles de traitement d’image d’ETO 3D ne permettent qu’une modélisation en systole. C’est pas mal, mais c’est un peu court pour explorer la dynamique de l’anneau mitral, qui joue un rôle de « sphincter », et dont la surface diminue en systole. C’est totalement insuffisant pour évaluer le couple aorto-mitral, c’est à dire l’interrelation entre le mouvement de la racine aortique et l’anneau mitral.
Grâce aux joueurs de Chicago, nos milanais ont pu mettre en évidence le rôle délétère de l’annuloplastie mitrale sur les mouvements de l’anneau aortique et sur la pulsatilité aortique.
Nos auteurs concluent à un impact negatif de l’annuloplastie mitrale sur la dynamique de la racine aortique.
OK.
Bon.
Mais, en fait, on si l’annuloplastie mitrale induisait des maladie de la valve aortique, il est assez probable que l’on ait été au courant, depuis les années 1980…
Ce qui est beaucoup plus amusant à imaginer (à mon humble avis), c’est l’impact de la valvulopathie aortique, de la rigidification du culot aortique dans le RAC, sur le développement de l’insuffisance mitrale!
Enfin, cette article à l’avantage de mesurer des variations d’aires mitrales durant le cycle cardiaque. Chez les sujets contrôles (pauvres fellows…) la surface mitrale systolique est à -21% de la surface diastolique. Dans cet article de la Mayo clinic sur la dynamique de l’anneau mitral, les conclusions étaient un peu plus complexes, la forme en selle de l’anneau s’accentue en systole, avec une diminution de l’aire en début de systole, puis une ré-augmentation en fin de systole.
Voici, pour ceux qui ont eu l’immmmmense courage d’arriver jusqu’ici, quelques exemples d’anneaux :
Première ligne, anneau mitral normal, passant de 7.3 à 6 cm2, soit une réduction de 16%.
Deuxième ligne, IM sur endocardite, l’anneau, dilaté, passe de 10 à 13 cm2.
Troisième et dernière ligne, maladie de Barlow, l’anneau passe de 10 à 17 cm2, soit une augmentation de L’ordre de 40%!
L’ETO 3D permettra donc à terme d’analyser la dynamique des anneaux mitro-aortiques et la possible responsabilité de la dysfonction annulaire dans la fuite mitrale en général, et dans la maladie de Barlow en particulier. Un petite pierre de plus dans la théorie (une de mes nombreuses théories fumeuses) sur la responsabilité du VG la maladie de Barlow.
Je tente une première : l’auto commentaire! (Je me doutais bien que ce post serait peu commenté…)
L’ETO 3D, (et bientôt l’ETT 3D probablement), permet d’aller assez loin dans l’analyse de la dysfonction mitrale, qu’elle soit liée à une dysfonction myocardique, de l’appareil sous valvulaire, de l’anneau, des feuillets, ou de tous ces éléments ensembles. Plus ces anomalies s’additionnent, et plus la mitrale « dysfonctionne ». Il serait à mon sens beaucoup plus intéressant de quantifier ces « dysfonctions mitrales » que des surfaces d’orifice régurgitant avec la PISA. L’IM fonctionnelle est un excellent exemple, puisque la SOR retenue pour le grade IV a été revu à la baisse. La taille du jet couleur ne rend pas compte de la sévérité de la fuite. Je pense qu’il y va de même pour la maladie de Barlow, où la dysfonction peut-être importante, et les fuites qui en résultent peu volumineuses.
Comme le disait un illustre chirurgien lors des ETO de contrôle post-plastie : « enlevez la couleur! »