Superstition
Le cas clinique précédent m’a rendu un peu perplexe, quoique la clinique, la dysfonction VG et la radiographie (avec les limites inhérentes à la qualité du cliché), suggèrent un œdème pulmonaire.
Vous l’avez compris, j’en ai profité pour mettre en application ma nouvelle résolution de plonger dans le monde aquatique de l’échographie pulmonaire, car, comme le disait maitre Yoda, « les pressions de remplissage gauche sur dyspnée aiguë, tu te garderas bien d’interpréter ». (Peu de gens connaissent cette citation, mais les connaissances médicales de Yoda dépassaient largement la confection de bras électroniques pour les Skywalker).
Et voici ce que j’ai vu :
20160819_022908_0021 from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
20160819_022908_0022 from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
Ce ne sont plus des comètes, c’est une pluie de météorites!
IL s’agissait bien d’un OAP, les suites ont étés simples sous VNI et furosémide, je n’ai même pas dégainé le SalbutAugmentalix, que tout amateur de dyspnée aiguë affectionne. Le BNP du lendemain est à 500, avant de retomber rapidement à 50 sous traitement.
Comment donc interpréter le flux mitral initial avec ces variations respiratoires?
Après Yoda, j’ai interrogé le sherif. Or le Shérif ne dis pas un mot sur les variations respiratoires sur ces recommandations ESC, mais il précise que lorsque E est inférieur à A, mais que la vélocité de E est supérieure à 0.5 cm/sec, il faut utiliser d’autres indices, et en particulier le DTI et la PAPs. Ici, l’onde E est véloce, le E/e’… est délicat, si on moyenne E, on obtient E/e’ à 10, donc non informatif. Pas d’IT captée.
La brutalité du tableau clinique est probablement liée à sa cause : l’ischémie myocardique. La surcharge volumique est très faible (il existe même des arguments pour une hypovolémie à droite), en revanche la POG est très élevée, du fait de l’inefficacité aiguë du VG (d’où l’élévation brutale des lactates, et le retard du BNP), un peu comme dans l’OAP hypertensif. Plein à gauche, vide à droite…
Finalement, l’idée, dans ces situations, de commencer par l’écho pulmonaire, et de ne faire une échographie cardiaque ciblée qu’en cas de doute, fait un peu mal au cœur des cardiologues échographistes, mais peu s’avérer plus rentable et surtout beaucoup plus rapide… (je pose ici des recommandations Européennes sur la prise en charge des situations cardiaques aux urgences, la simplicité des lignes B tranche avec les exemples d’ETT!)
Pour clore ce cas, après Yoda et le Sherif, j’ai consulté Stevie Wonder, comme je le fais régulièrement quand je suis un peu perdu sur les pressions de remplissage et la fonction diastolique (les connaissances médicales de Stevie Wonder dépassent largement un coup de téléphone pour dire « I love you »).
Il m’a répondu ça : » When you believe in things that you don’t understand Then you suffer… Superstition ain’t the way »
Plutôt que de vous infliger la VO avec 30 min de pub avant, je vous propose une version alternative assez efficace de Superstition.
PS: merci aux « super-répondeurs » qui animent la discussion 😉
Salut Capitaine !
Pour moi ce cas clinique est une belle illustration que les cardiologues ne croient plus au dosage de la troponine 😉
Mouhahahaha
Ces situations d’interprétation des pressions de remplissage explique la venue du saint père, le pape, demain pour cloturer le congres de l’ESC à Rome.
@nfkb et whitshark : Si je vous suis bien, les cardiologues qui ne croient plus en la troponine font venir le pape à leur congrès? (et lui offre un stéthoscope!)
Merci pour ce cas clinique car tous les jours je pondère les informations que l’on croit tirer des indices Doppler.
Tout d’abord parce que je commence a avoir rencontré un certains nombre d’OAP dont l’épreuve thérapeutique m’a prouvé qu’ils étaient bien hémodynamiques alors que le doppler disait mi-figue mi-raison (ou zone grise pour les achromatopsiques).
Ensuite parce que le seule chose qu’on mesure est la vitesse des globules rouges et donc la seule réponse fiable que je peux donner est : « à cet endroit là, et à cette phase du cycle cardiaque, les globules rouges atteignent la vitesse maximale de xx m/s ». Le reste est extrapolation pour essayer d’imaginer quels sont les gradients de pression qui ont généré cette vitesse (faisant fit de tout un tas d’approximation qu’on ne prend jamais la peine de vérifier). Laquelle pression hydrostatique supposée entraîner une fuite serait la même chez tous les malades et dans toutes les situations à l’origine de la décompensation (la barrière alvéolocapillaire et la pression oncotique est la même tout le temps c’est bien connu).
Enfin parce que les ratio donnent soit-disant des chiffres magiques qui permettent de trancher, mais en réalité les ratio multiplient les erreurs de mesures, d’autant plus qu’on divise par des nombres inférieurs à 1 !!! Amusez vous à regarder ce que vous auriez trouvé comme E/E’ si vous aviez mesuré E’ à 0.1 de plus ou de moins…
A ma connaissance les quelques études qui ont comparé les pressions de remplissage et le E/A sont catégorielles (si E/A > chiffre magique alors PAPO > autre chiffre magique) et ne donnent pas toutes exactement la même chose. Et le E/E’ n’a pour l’instant aucune justification solide ( http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26811160 ). Il y aurait tant à dire sur l’interprétation de ce que mesure le Doppler tissulaire.
Du coup je ne regarde plus que l’onde E, et si elle va vite je me demande si le patient a un fonction cardiaque expliquant que ça passe vite entre l’oreillette et le ventricule. En général la réponse est facile à trouver.
Quand à l’écho pulmonaire, c’est pas parce que y a de l’eau dans le poumon que c’est la faute du cœur comme disait maître Laennec, le Jedi qui a formé Yoda à la détection de l’eau dans le poumon (par une technique qui nécessitait d’avoir un peu d’oreille, ce dont je ne doute pas que tu ais au vu des choix musicaux qui illustrent tes cas cliniques 😉 )
Merci pour ce commentaire! Je vois que nous sommes d’accord sur le son et sur l’ultrason.
Perso, quand la clinique et la radio me disent OAP, et que le Doppler ne colle pas, j’éteins l’échographe.
(…Enfin, je le mets sur veille, on ne sait jamais, si il y a un globe vésical sous furosémide… ;)).
Je rebondis sur la problématique ras-des-pâquerettes : le globe vésical.
J’essaye de lutter contre les sondages abusifs en rappelant qu’on peut donner un peu de temps au temps et qu’un vrai globe ça donne des signes cliniques dans la majorité des cas non ?
J’en ai en effet un peu marre de voir des patients finir sous Xatral + sonde vésicale parce qu’on n’a pas été patient.
Question : est ce qu’avec votre usage des diurétiques et la population parfois âgée en cardio (hum) vous observez beaucoup de globes avec douleur agitation ou clinique dans le genre ?
Merci
Nous luttons aussi, nos patients étant sous anticoagulants, ils gagnent souvent la double courant d’emblée… On utilise le zizilex, mais un homme âgé, au lit et sous lasilix, ça donne Uand même assez régulièrement un bon gros globe symptomatique…