Every breath you take
Mais pourquoi la FEVG est elle régulièrement plus basse en IRM qu’en ETT??
J’avais déjà évoqué le sujet ici :
– il y a le problème d’exclure ou non les trabéculations dans le contourage (en passant dans la couche « compactée »)
– la résolution temporelle de l’IRM et l’absence d’ECG en IRM qui peut faire sous estimer la télésystole, évènement très bref ou le volume VG est le plus petit
– et l’explication qui me séduit le moins, celle de la fatalité.
Explorons une autre piste, tout bête : la respiration.
Les acquisitions en IRM sont faites en inspiration profonde et en apnée, or lors d’une FEVG en Simpson biplan, on ne demande pas systématiquement d’apnée. Avec l’arrivée du HeartModel, logiciel d’évaluation de la FEVG 3d, l’acquisition se fait sur 4 cycles, et l’apnée est souhaitable.
Je vous propose le cas d’un patient avec cardiopathie ischémique ancienne, hospitalisé pour décompensation, et examiné après 24h de déplétion.
Voici les coupes réalisées « à l’ancienne » avec la sonde 2d :
4 cav S5.avi from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
2cav s5.avi from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
Et revoilà le même VG avec la sonde X5 en inspiration profonde, sans bouger le capteur, en utilisant la rotation d’angle pour être sur d’avoir une coupe orthogonale à la précédente :
4cavX5.avi from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
2cav x5 from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
La FEVG parait plus mauvaise en inspiration profonde qu’en respiration libre.
Voyons donc l’effet d’une inspiration profonde sur un VG altéré, (regardez bien la contraction septale, par rapport à la première acquisition en « respiration libre ») :
Ballon from fish Nip echocardiographie on Vimeo.
L’inspiration profonde augmente la précharge, donc le volume télédiastolique, et peut, sur des VG altérés, diminuer la FEVG et donc augmenter le volume télésystolique. Or les discordances entre FE écho et FE IRM sont plus importantes sur les FEVG basses, c’est à dire pour les patients chez qui cette évaluation est la plus cruciale (indication de DAI, de CRT etc…).
Bizarrement, peu d’articles sont disponibles sur le sujet, et les investigations sont réalisées sur des petits groupes de sujets volontaires sains, comme dans cette étude en IRM..
Le volume d’éjection systolique baisse lors de l’inspiration forcée et lors d’un valsalva chez les sujets sains :
Il est fort probable que ces variations soient beaucoup plus sévères chez les patients présentant une insuffisance cardiaque (systolique ou diastolique, mono ou biventriculaire…)
Bon, je vous laisse, je vais respirer tranquillement…
Je tiens à préciser que le volume d’éjection systolique du VD baisse en fin d’inspiration, et pas celui du VG (ce qui est tout à fait logique d’ailleurs), ce qui rend ton discours un peu plus discutable…
L’inspiration augmente la précharge du VD (aspiration du sang de la VCI, soumise à la pression abdominale), et pas ou peu celle du VG. Cette augmentation de la précharge VD augmentera le débit droit, donc la précharge VG (en général avec un retard d’un ou deux cycles cardiaques).
Encore une remarque, tu dis que l’augmentation de la précharge VG peu diminuer la FEVG. Cela n’est valable que si l’on est sur la deuxième partie de la courbe de la loi de Starling, donc sur des pressions de remplissage déjà très élevées (ou des coeurs au bout du rouleau).
Et je me permets de faire remarquer, à visée didactique pour ceux qui se servent de ton blog pour se former, comme moi quand j’étais plus jeune (souvenirs souvenirs…) que la coupe 2 cavités avec la rotation du moteur se retrouve à 300°, et la 3 cavités entre 230 et 240° (sur Philips, les GE ayant décider de faire la rotation dans l’autre sens). Ta coupe orthogonale à 265° ne correspond donc pas à une A2C, ce qui explique qu’on ne retrouve pas l’auricule gauche, si bien vu dans ta coupe 2 cavités classique prise avec la S5-1.
Personnellement j’ai toujours été plus convaincu par ton discours sur la télésystole, raté en IRM, et sur le contourage différent avec les trabéculations. J’y rajoute (humblement) qu’on a fréquemment des coupes endapexiennes qui nous font surestimer la FEVG en ETT, ce que l’on peu en partie récupérer avec la largeur du champ des sondes 3D…
Merci pour ce commentaire!
Je t’accorde volontiers que la sélection des coupes n’est pas très judicieuse. Comme en ETO, les indications d’angle me paraissent plus être justement « indicatives », et de la même façon qu’en ETO l’auricule à 30° n’est pas toujours à 30°, les coupes ETT peuvent varier?
Sur le fond, je suis entièrement d’accord avec toi, sur plusieurs points, et j’ai écris cette note trop vite (mais je tenais à l’écrire!).
Les variations de volumes gauches, quelques cycles après l’inspiration, vont jouer sur le volume d’éjection et altérer la fonction systolique gauche chez les patients en insuffisance cardiaque systolique (le cas présenté est exactement celui là, patient « à moitié déplété », sous diurétiques IV…). Ceci n’est d’ailleurs vrai que si le VD est compétant, car en cas d’insuffisance cardiaque droite, c’est le VD qui va flancher!
C’est pourquoi j’ai précisé que les discordances ett/irm sont plus fréquentes pour les fonctions VG altérées. Les patients examinés dans ces conditions hémodynamiques peuvent, à mon avis, avoir de vraies variations de FEVG en apnée.
Quant à l’affaire de la télésystole, je reste convaincu, mais je suis encore surpris de voir des FEVG à 40% en IRM, qui « à l’œil » me paraissent complètement normale. Je ne sais pas quelle est ton impression dans ton centre?
Merci encore de ton message et ton assiduité, et j’espère à bientôt, (en congrès d’écho?)
Tout d’abord je m’excuse si le ton de mon premier post était un peu critique (en le relisant je m’apercois que ce n’était pas super sympa), ce n’était pas mon intention au départ de faire du mauvais esprit…
J’ai la même expérience dans mon centre, avec des IRM cardiaques qui rendent bien en moyenne 5% de moins de FEVG qu’en échographie…
Lorsque j’en ai discuté avec quelques collègues d’autres centres, on m’a dit que chez eux les volumes étaient plus importants, mais aussi bien en télésystole qu’en télédiastole mais qu’ils n’ont pas trouvé que la FEVG soit si différente…
Je reste dubitatif…
Je reconnais que les discordances les plus flagrantes concernent les patients avec un gros bloc de branche gauche, où nous avons tendance à être un peu « gentils » et nous auto-censurer quant la FEVG est vraiment basse alors que la contractilité de chaque paroi est normale (alors que les radiologues sont en général sans pitié).
A bientôt (peut-être en congrès)
PS : ces derniers temps, je recevais régulièrement des internes qui venaient de chez toi, et qui me disaient parfois « ah oui, comme Philippe … » lorsque je leur montrais des petits trucs… Le prochain semestre, à toi de recevoir certains de mes internes!
Ne t’excuses pas, c’est toi qui a raison! Je viens d’ailleurs de changer la coupe 2 cav X5-1 pour une autre (plus belle, avec l’auricule et tout…) obtenue à 310° (j’avais plein de boucles et je me suis emmêlé les pinceaux).
Ravi de voir que tu as pu faire les mêmes constatations sur l’IRM.
Le BBG, c’est encore autre chose, car tout dépend de si tu prends la diastole et la systole ECG ou mécanique. Si tu te fie à l’ECG (ce que j’ai renoncé à faire), la diastole n’est pas finie au pied du QRS, et la systole n’est pas finie au sommet de l’onde T. En se débrouillant bien, tu peux même obtenir des FEVG négatives… En IRM, pas d’ECG pour le calcul de la FE. Du coup moi je fais plus gros volume et plus petit, sans regarder l’ECG, et si possible en 3D.
Bon, ça reste difficile, entre 35 et 45…
J’espère que tes internes sont aussi cool les miens!
A bientôt!